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Wallonie-France
8 septembre 2008

La City Parade de Liège attire plus que le Gordel flamand

Liège comme à la parade

PIERRE MOREL

dimanche 07 septembre 2008, 20:48

PLUS DE 200.000 personnes se sont retrouvées dans les rues de la Cité ardente pour une City Parade sans problème majeur.
Qu'on aime ça ou pas, il faut reconnaître que la City Parade, de retour à Liège ce samedi après trois ans d'absence, a quelque chose de merveilleux. Il fallait se jucher sur un pont, comme bon nombre de badauds l'ont fait tout au long du parcours, pour saisir l'ampleur de l'événement. Parallélisme troublant entre le cours tranquille de la Meuse et le véritable flot humain, clapotant au vent des décibels et des déhanchements frénétiques, qui s'étend à perte de vue sur le quai autour des chars bariolés.

Dès le rassemblement, dans le parc d'Avroy, la foule est impressionnante. Sur les trois scènes installées dans le parc, les DJ chauffent une masse compacte de participants. Il n'y a pas, tant s'en faut, que des jeunes aficionados de la « techno » : on croise des poussettes et des couples de citadins d'âge mûr venus humer l'ambiance. Vu le prix des boissons (deux euros le coca ou la bière), beaucoup sont venus avec leurs propres munitions, et ça boit déjà les alcools forts à même la bouteille, ce qui laisse présager une soirée difficile pour certains. L'heure est également à l'excentricité vestimentaire : crêtes, colorations, résilles et décolletés sont légion, l'attirail « sexy » est de rigueur. Les grands standards, visiblement : le rose et, surtout, le « Stetson » américain. Parrain télévisuel de la manifestation, Plug RTL a d'ailleurs distribué des milliers de ces chapeaux, bleu fluo. Les hélicoptères vrombissent dans le ciel, les files s'allongent déjà devant les toilettes provisoires, les policiers à cheval chargent pour disperser une première échauffourée : chaud !

Le cortège de chars musicaux s'ébroue à 18 heures dans un véritable cataclysme sonore. Les 25 chars sont entourés d'un service d'ordre efficace qui évite que les danseurs ne s'en approchent dangereusement. Juchées sur les baffles, des jeunes filles aguicheuses distribuent flyers, boissons, sifflets et autocollants et motivent la foule des danseurs qui suivent le mouvement. Ça sent la sueur, la marijuana et la bière. On croise un groupe d'étudiants de Lille qui « ne raterait ça pour rien au monde : en Belgique, on fait la fête comme nulle part ! ».

Le long du parcours, les curieux, amusés par le tintamarre chamarré, ont la banane. Un couple de retraités écarquille les yeux. « Ça fait beaucoup trop de bruit, mais mon mari voulait sans doute voir les filles », persifle madame. Scènes habituelles de désolation à l'arrière du cortège : la City parade voulait peut-être « Sauver la planète », son thème 2008, mais les déchets produits n'y contribueront guère. Place du XX Août, les automobilistes imprudents, englués dans des embouteillages monstres, observent le spectacle, penauds et résignés. Un vieux mendiant s'est coiffé d'un Stetson bleu, mais la récolte sera médiocre.

Vers 21 heures, les chars débarquent au parc Astrid où les plus acharnés entament une nuit de danse qui ne fait que commencer. Pour les forces de sécurité, mobilisées en très grand nombre (voir ci-dessous), c'est le moment des premiers bilans. Plus de 200.000 participants, quatre personnes à aller repêcher dans la Meuse, une trentaine d'arrestations, un peu plus de deux cents admissions dans les postes médicaux avancés et vingt-cinq hospitalisations, aucune réellement préoccupante.

Rien de grave : Liège a pu retourner à son train-train. Pour beaucoup, la matinée de dimanche a été grasse.

Dans la roue du ministre-président

DIRK VANOVERBEKE

dimanche 07 septembre 2008, 22:55

LA PROMENADE autour de Bruxelles s’est muée en pétard détrempé. Dans le sillage d’un Kris Peeters qui garde la pêche, les participants au Gordel étaient au nombre de 58.000. Pas un franc succès.

REPORTAGE

7 h 30. La salle Hof ter Meeren de la rue de la Gare, à Zaventem, un des cinq points de départ du Gordel, est réservée aux politiques. La ruche s’organise, le dresscode respecté. Vareuse jaune, short noir, les couleurs de la Flandre s’affichent partout. Il n’y a que les slogans qui changent et barrent les nouveaux tee-shirts. Dehors, la pluie s’est mise à tomber. Drue. Glacée.

Johan Sauwens, l’ex-ministre nationaliste des Communications passé dans les rangs du CD&V qui laissera son nom à la postérité en ayant fait peindre en jaune et noir tous les poteaux de signalisation de Flandre, a conservé le maillot de la dernière édition, barré du slogan « Splits BHV Nu » (« Scindez maintenant »). D’autres, comme Eric Van Rompuy, échevin CD&V de Zaventem, arborent le nouveau « Ik hou van alle Zes » (« Je les aime toutes les six », allusion aux six communes à facilités dont le Gordel entend défendre le caractère flamand). Ambiance bon enfant. Bert Anciaux, autre ex-Volksunie est au rendez-vous, comme Bart De Wever, le président de la N-VA. Le buffet, breughelien, est pris d’assaut. Mouvement de foule, déplacements de caméras : Kris Peeters, ministre-président flamand, fait son entrée. Avec une tenue distinctive : vareuse rouge, short noir. Le temps d’un café et d’une demi-douzaine d’interviews et il enfourche son vélo. Il a choisi le parcours de 25 kilomètres. Il est attendu à 11h30 sur les plateaux de la VRT.

8h30. La pluie a redoublé. Mon K-Way mauve bonbon fait tâche dans la forêt détrempée de drapeaux jaune et noir. En tête du groupe, Peeters place un démarrage. La bordure est immédiate. Au sommet de la côte, il constate les dégâts à l’arrière : « C’est au ministre-président à imprimer le tempo et je veux voir tout le monde en ligne », plaisante-t-il. Puis, après m’avoir permis de revenir à sa hauteur, confie : « Je ne comprends pas la réaction de Didier Reynders dans son interview au Soir, lorsqu’il affirme qu’il ne participera pas aux négociations si Yves Leterme n’en fait pas partie. C’est très étrange. » Le vent fouette les visages, mais le souffle fait défaut : je parviens à lui demander s’il espère que sa proposition permettra de mettre Leterme à l’abri au 16, en lui évitant des élections : « Il faut bien que quelqu’un s’expose. J’attends la réponse des francophones. J’espère qu’elle sera positive. »

9h30. On approche de Cortenberg. Kris Peeters propose une tournée de cafés et de sodas à un poste de ravitaillement. Le groupe a explosé. Eric Van Rompuy me présente Baudouin Baudru. Un Tournaisien. Rallié à la cause flamande, il préside le CD&V de Zaventem et est devenu un des plus ardents défenseurs du splitsing de BHV. « Vous trouvez normal qu’un Wallon de Waterloo ne puisse pas voter pour la Bruxelloise Brigitte Grauwels alors qu’un Flamand de Zaventem peut le faire pour Maingain ? Nous sommes en Flandre. Il est légitime, pour ceux qui s’y établissent, d’y parler la langue… »

10 heures. La pluie tombe encore plus drue. La route est déserte. « Les familles se lancent plus tard sur le Gordel, précise Eric Van Rompuy, qui n’a raté aucune édition ; la première, à Rhode-Saint-Genèse, en 1981. Mais à cause du temps infect, cette édition n’attirera que 58.000 personnes. Près de 20.000 de moins qu’en 2007.

11 heures. Le ministre-président a bouclé son parcours. Sur la Grand-Place de Zaventem, l’extrême droite chauffe ses troupes et raille le cartel flamand, incapable d’avoir respecté sa promesse. Sur les T-shirts jaune et noir des nombreux sympathisants d’extrême droite, on peut lire le vieux slogan du CD&V : « Vijf minuten politieke moed » («Cinq minutes de courage politique»). Accroché par des sympathisants du Belang qui raille l’impuissance des démocrates-chrétiens face aux francophones, Van Rompuy décide de pousser une pointe jusqu’à Wezembeek. Je prends sa roue.

11h30. Les nationalistes flamands de la N-VA ont leur stand à Crainhem, où ils offrent bières et drapeaux. Bart De Wever, entouré de parlementaires, se réjouit de n’avoir capté aucune réaction francophone négative à la décision de Peeters de laisser BHV se dérouler dans l’enceinte parlementaire. Les promeneurs de la N-VA le rejoignent et ont une autre bonne nouvelle à lui annoncer : la Bretelle fait un flop à Woluwe. Eric Van Rompuy poursuit sa route vers Wezembeek. Sur une petite route de campagne, un père et ses filles surcollent les panneaux du Gordel de petits drapeaux rouge-jaune-noir qui scandent : « 3 langues, 1 âme, une Belgique ». Le député flamand s’arrête pour arracher l’outrage. « Pourquoi jouez-vous la provocation ? », s’insurge cet habitant de Crainhem. « Nous sommes en territoire flamand ici », réplique Van Rompuy.

Dans la descente vers Wezembeek, des cyclistes pestent, le boyau crevé à la main. L’un d’eux me désigne le coupable : une punaise. « Il y en a des dizaines qui ont été jetées sur la route, ici. Ils ont déplacé des panneaux cette nuit aussi. Ils nous empêchent de nous déplacer sur notre propre sol. C’est inadmissible. » Quelques jurons. Quelques insultes à l’adresse du FDF. Le vent se remet à souffler de plus belle…

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